J28

6 avril 2023

La nuit le vent était moins violent que la journée de repos de la veille.
Au lever du jour nous sommes enveloppés par une brume, presque brouillard, légèrement humide et fraîche. Nous mettons les vestes chaudes pour la première fois depuis presque un mois de marche. La pluie tombée sur le versant nord de l’Atlas nous envoie la fraîcheur de ses embruns.
Les crêtes de montagnes successives se découpent en arrière-plan dans un dégradé de gris – crème de grande beauté et me fait penser aux dessins de Samivel ayant nourrit mes rêves d’adolescent.
Nous sentons le terrain légèrement en descente, la caravane avance vite ce matin sur un ensemble de sentiers et petites pistes. Hier Brahim à profiter de cette journée de halte pour repérer une partie du parcours évitant quelques vallons très escarpés sans chemin.
Nous coupons l’assif Taboughri où quelques campements de nomades venus d’Imelghane, haute vallée de l’Atlas viennent juste de s’installer. L’hiver étant un peu rude dans cette haute vallée à 2600 mètre d’altitude au pied du M’goun, les bergers transhument avec leurs troupeaux de brebis et chèvres dans la grande plaine du Dadès à la recherche des lieux les plus arrosés par la pluie où l’herbe à suffisamment poussé.
Cet automne – hiver le bassin de Ouarzazate à accueilli la pluie 8 où 9 fois, dont 7 fois par des pluies conséquentes venus du Sud – sud-Ouest. Ce phénomène est rare à Ouarzazate, les pluies habituelles viennent du nord et nous recevons l’extrémité des masses nuageuses de l’Europe ayant réussi à franchir la barrière naturelle du haut Atlas à 4000 mètres.
Marrakech cette année a été arrosé seulement 2 où 3 fois, inversion curieuse, est-ce dû aux changements climatiques dont on parle tant ?
Plusieurs « tumulus » tout au long de notre Cheminement aujourd’hui montrent que nous sommes bien sur un axe très ancien de passages de caravanes.
Houda est heureuse de retrouver des plaines de cailloux pour « frotter » ses calques avec de l’encre où apparaît la structure de la roche et s’impriment des tableaux uniques.
A l’approche de Ouarzazate, nous découvrons quelques fermes et il est très encourageant de visualiser que dans un milieu si hostile des hommes osent investir dans l’agriculture. L’état a lancé un projet de développement agricole de terres autrefois non cultivées. Bravo !
Nous coupons l’oued Fint encore en eau dans sa partie basse où il rejoint le lac du barrage Mansour Eddahbi. La traversée de l’oued est délicate pour les dromadaires du désert ! La masse de l’eau est un élément difficile pour les chameaux dont la « sole », arrondie (dessous du pied du dromadaire) rend particulièrement glissant leur marche dans la boue, surtout chargés de bagages.
La récompense pour les chameaux est grande, par la végétation luxuriante des rives de l’oued.
Un berger semi-nomade de Tessaout n’Afeula m’accoste. Nous nous sommes déjà croisés au cœur de l’Atlas en l’hiver il y a une année et demie dans la haute Tessaout. Lui marchait sous la neige tombante avec un gros sac de retour du souk de Toundout et moi avec mon ami Rachid à ski de 3 jours de randonnée sous la neige.
Nous installons le bivouac sur une terrasse qui domine l’oued Fint dans une partie de la gorge abritée du vent, en lisière du lac Mansour Eddahbi.
6 heures de marche, 21 km sentiers et pistes sur les plateaux vallonnés, altitude 1110 mètres.